Rédigé par Martine – 30 novembre 2017 –
Prologue
Durant mon séjour, je n’ai eu qu’un aperçu de la capitale allemande. En effet, j’ai choisi d’aller à la rencontre de l’Histoire. Je me suis donc concentrée plus particulièrement sur le centre historique et j’ai dû naturellement faire des choix parmi les musées ne voulant pas tout faire au pas de course. Je me suis dit : « j’y reviendrai ».
Vendredi 24 novembre 2017
Voilà, c’est parti! Depuis le temps que je le prépare ce voyage à Berlin! Je suis dans le « Nightjet » en partance pour la capitale allemande. J’ai trouvé ma cabine située dans les entrailles du wagon. Elle se situe presque à la hauteur des rails. Eh oui, on est soit en haut, soit en bas dans ces trains à deux étages ! Ça ne change rien au problème : à peine en route, on est bringuebalé à droite et à gauche et le bruit se révèle être aussi un facteur d’insomnie… Je reçois une petite bouteille de Prosecco et des boules Quies pour diminuer les nuisances du voyage et, étant plutôt optimiste, je pense que je vais bien dormir. Objectif moyennement atteint!
Samedi 25 novembre 2017
Pas besoin d’aller très loin pour assister aux grands chambardements que vit Berlin depuis la chute du Mur. Dès la gare centrale, la plus grande d’Europe, on s’en aperçoit. Où que l’on aille, ce ne sont que chantiers, échafaudages . Partout on rénove, on construit ou reconstruit. La vue est sans cesse perturbée par une grue ou une excavatrice et le bruit inhérent à ce genre de travaux accompagne le touriste partout lors de ses pérégrinations à travers la ville. Voilà pour l’introduction!
Après avoir déposé mes bagages à l’hôtel, il est 06h00 du matin, il fait encore nuit et il pleut à verse. Ma première tentative pour quitter la gare centrale sans le précieux accessoire qu’est un parapluie se révèle désastreuse … je me résous à rebrousser chemin et à acheter un « pépin » . Ce n’est pas le premier, j’en ai déjà une belle collection!
Munie de ce précieux objet mais qui se révélera aussi encombrant, je me rends dans le quartier du Reichstag.
Le bâtiment principal, lieu des délibérations du parlement allemand, incendié en 1933, bombardé pendant la deuxième guerre mondiale, fut, pendant 29 ans, longé par le Mur qui le laissa dans le secteur ouest de la ville. Histoire mouvementée que celle de ce lieu. L’édifice est restauré à plusieurs reprises et, au moment de la réunification allemande, Norman Foster reçoit le mandat de réhabiliter le bâtiment et le surmonte d’une coupole vitrée.
J’ai pu réserver une visite guidée des lieux depuis la Suisse. Les contrôles de sécurité sont drastiques et on peut le comprendre. Enfin, après une demi-heure d’attente, je peux pénétrer dans le bâtiment. Le guide, dans un excellent français, nous explique le fonctionnement des institutions allemandes dans la salle plénière située sous la coupole.
Il nous montre également d’autres endroits marqués par l’histoire.
A la fin de la visite guidée, j’emprunte la rampe en spirale qui me mène à la terrasse, située au sommet de l’édifice d’où j’ai une vue panoramique sur tout Berlin.
Près du Reichstag, s’élèvent d’audacieuses constructions de béton et de verre qui abritent les différents offices gouvernementaux ainsi que la chancellerie.
Continuant ma balade à pied, je me retrouve face à la Porte de Brandebourg, autre monument emblématique de la ville.
Pendant plusieurs décennies, c’était un cul-de-sac. Il fallait se contenter d’observer la porte depuis le Mur mais cette époque est aujourd’hui révolue. On peut flâner sous ses arches et les traverser pour longer la célèbre artère Unter den Linden où se succèdent des édifices impressionnants commandés par les Hohenzollern.
Cette caserne « Neue Wache » est aujourd’hui un mémorial dédié aux victimes de la seconde guerre mondiale, de la dictature et du régime est-allemand
Mais qu’on ne s’y trompe pas. Ces bâtiments ont tous été reconstruits ou rénovés. Les bombardements durant la guerre ont détruit le 80% de la ville!
Je passe encore un certain temps au musée historique allemand avant de rejoindre mon hôtel.
Il est déjà 18h00, la nuit est tombée depuis deux heures. Je dois prendre possession de ma chambre, manger une « bricole » avant de ressortir. En effet, j’ai réservé une place pour un concert au Berliner Dom : le requiem de Mozart. J’ai beaucoup baguenaudé pendant la journée et je jouis pleinement de ce très beau moment musical.
Dimanche 26 novembre 2017
J’ai prévu de faire une visite guidée et je me rends au rendez-vous sur la Potsdamerplatz. En 1989, quand le Mur est tombé, la place et ses alentours formaient une vaste friche au coeur même de la ville. Pour la rebâtir. on a fait appel à des fonds privés. Aujourd’hui, un quartier très moderne est né.
Il reste, malgré cette métamorphose, quelques vestiges du Mur qui coupait la place en deux.
Avant d’atteindre la Potsdamerplatz, je passe par le Mémorial de l’holocauste.
Ici, à Berlin, il y a partout des signes rappelant l’histoire de la ville et de l’Allemagne sous le régime national-socialiste ou durant la guerre froide. On peut ne pas y faire attention, les ignorer mais c’est presque impossible.
Notre guide nous emmène au Mémorial du Mur à la Bernauerstrasse, inauguré le 13 août 2011, soit 50 ans après l’érection du Mur. Il s’agit du dernier tronçon du Mur de Berlin encore conservé dans son intégralité, avec mur intérieur, chemin de ronde, miradors et « no man’s land ».
Nous terminons la visite par East Side Gallery. Dans un décor de friche industrielle, 1300 mètres de Mur. En le longeant, on découvre une galerie (d’art) à ciel ouvert; de nombreux artistes d’origines diverses ont réalisé une fresque évoquant la division de la ville.
Je m’y attarde un peu avant de reprendre un S-Bahn pour le centre-ville. Je tiens à visiter « Tränenpalast », le palais des larmes, dans le langage populaire. En réalité, il s’agit d’un ancien poste frontière qui recèle encore des traces du temps de la division allemande. Cet endroit nous met en situation : processus de contrôle, démarches douanières. Tampons, passeports, visas et toutes sortes de formulaires témoignent de la complexité du passage de la frontière.
Ce lieu m’a marqué émotionnellement : l’atmosphère était à la surveillance et aux chicanes : temps d’attente de plusieurs heures au contrôle des passeports, ton cinglant des contrôleurs auxquels s’ajoute la peur de se voir refuser arbitrairement l’autorisation de quitter le territoire.
Lundi 27 novembre 2017
Au centre de Berlin se trouve une concentration de musées peu commune. Ceux-ci renferment d’ailleurs l’une des plus riches collections d’art au monde.
Mon intention n’est pas de tous les visiter aujourd’hui, ni même de tout voir dans ceux sur lesquels j’ai jeté mon dévolu.
Je commence par le Nouveau Musée et m’attarde particulièrement sur la collection égyptienne. Je peux enfin voir de visu le célèbre buste de la reine Nefertiti, découvert à Amarna en 1912.
Ma visite continue au musée de Pergame, connu mondialement pour ses reconstructions historiques monumentales. Je suis fascinée devant la porte d’Ishtar, l’une des 8 portes de Babylone, qui date du 6e siècle av. J.C.
Je passe ensuite à la porte du marché de Milet (100 apr. J.C.).
C’est gigantesque et surtout impressionnant de voir ces constructions antiques reconstituées à l’intérieur d’un musée.
Et l’autel de Pergame ? élément incontournable du musée, l’une des oeuvres les plus admirables de l’Antiquité… je ne le verrai pas, la salle est en restauration!
Après avoir quitté l’île aux musées, je rejoins à pied l’Alexanderplatz, centre névralgique au temps de la RDA, entourée d’immeubles à l’esthétique plus que douteuse, à l’image même de l’urbanisme de l’ex-RDA.
La tour de la télévision inaugurée en 1965, la fierté du régime est-allemand, est l’emblème de la place. Je décide d’y monter pour admirer la vue sur Berlin. Un ascenseur me catapulte en un rien de temps au sommet. Le panorama est exceptionnel.
Après cet intermède, comme je suis dans la partie est-allemande de la ville, j’en profite pour visiter le petit musée de la RDA. Intéressant, il donne un aperçu de la société et de la culture durant la guerre froide : la consommation et ses prix contrôlés, les difficultés pour se ravitailler, les services secrets… On a également reconstitué un appartement-témoin qui me fait penser à celui que j’avais vu dans le film « Good Bye Lenin ».
La journée a été une fois de plus bien remplie. Les lumières du marché de Noël de Gendarmenmarkt m’attirent.
J’y fait un tour et j’en profite pour manger un « langos », une spécialité hongroise. Il s’agit d’une sorte de pain en forme de galette, cuit dans l’huile. On me le recouvre encore de crème aigre et de fromage. Je me régale et, contre toute attente, mon estomac l’a digéré sans problème.
Mardi 28 novembre 2017
Je quitte Berlin, je me mets au vert pour une journée. Aujourd’hui, je rejoins Potsdam en S-Bahn, la banlieue résidentielle huppée de la capitale. Mais ce n’est pas pour cela que je m’y rends; j’ai envie de voir le palais de « Sans-Souci », résidence d’été de Frédéric II.
Je ne me doute pas qu’il y a, en fait, un deuxième château ainsi qu’un parc gigantesque qui va de l’un à l’autre. En hiver, le parc ne paie pas de mine, aucune fleur n’égaie le paysage et les statues sont emprisonnées dans des caisses pour les protéger du gel. Je ne m’attarde donc pas dans les jardins ni devant le « Neues Palais » aux dimensions démesurées. Le roi voulait, paraît-il, montrer la puissance économique de la Prusse.
Je ne visite donc que Sans-souci aux dimensions plus modestes, résidence d’été de Frédéric II où Voltaire séjourna de 1750 à 1753.
Mon excursion à Potsdam se termine par la visite du château « Cecilienhof ». C’est cette résidence du fils aîné de Guillaume II qui accueillit, en 1945, la conférence de Potsdam durant laquelle Churchill, Truman et Staline décidèrent du sort de l’Allemagne vaincue.
Je retourne tranquillement au centre ville en passant par le quartier hollandais. Il fait déjà nuit bien qu’il soit à peine 16h15. Je m’attarde un peu au marché de Noël, déjà très animé, (deux jours après mon passage, il fut en partie évacué à cause d’une alerte à la bombe!) avant de retourner à Berlin.
Mercredi 29 novembre 2017
Déjà le dernier jour : il fait beau. Je décide de faire une nouvelle visite avec « Vive Berlin ». Mon expérience de dimanche dernier était concluante. Cette coopérative est formée de personnes compétentes aussi bien en histoire qu’en histoire de l’art. De plus, les circuits proposés sont originaux de par la personnalité de chacun des intervenants.
Aujourd’hui, le thème proposé est : « Berlin sous le nazisme, à l’ombre de la dictature ». Julien, notre guide du jour, nous emmène sur les lieux de la répression dans le quartier gouvernemental de l’époque pour nous faire comprendre les mécanismes de cette dictature.
Il nous rappelle les faits historiques mais s’attarde surtout sur le travail de mémoire des Allemands concernant ce lourd passé. Ces années de terreur ont existé, il faut le savoir mais la jeunesse n’est en rien responsable de ce qui s’est passé. Mais, à Berlin, partout, des lieux rappellent cette période.
Pour la petite histoire, Julien nous parle de sa belle-famille. C’est l’histoire de personnes anonymes: son beau-père, né en 1937, a fait partie des jeunesses hitlériennes parce qu’on ne pouvait faire autrement, on était enrôlé d’office. Sa belle-mère est née en 1942 dans un « Lebensborn » (association créée dans le but d’accélérer la création et le développement d’une race pure) en Autriche. Ils vivent encore et toujours avec des souvenirs douloureux. Elle ne connaît ni son père, ni sa mère. Cette triste période est encore bien présente.
La deuxième partie de la visite se passe dans l’ancien quartier juif. Le premier édifice qui accapare le regard en sortant du métro est la « nouvelle synagogue », construite au 19e siècle.
Elle a peu souffert du pogrom de la Nuit de Cristal: le commissaire du quartier ayant tenu les SA éloignés… l’édifice fut ainsi sauvé. Sa façade de style mauresque et sa coupole dorée en ont fait un des monuments emblématiques de Berlin. Un peu plus loin, se tenait autrefois une maison de retraite juive. A partir de 1942, elle servit à la Gestapo de lieu de rassemblement pour les derniers Juifs berlinois destinés à rejoindre les camps.
Niché dans une ruelle à peine visible, le petit musée de l’entreprise d’Otto Weidt. Ce dernier dirigeait une fabrique de balais et de brosses, employant des sourds et des aveugles, juifs et non juifs. Pendant des années, il réussit à protéger ses employés, soudoyant des officiers de la Gestapo pour les faire relâcher . Plusieurs pièces de l’atelier d’origine relatent la vie de ces ouvriers.
C’est dans ce quartier que j’ai vu pour la première fois les pavés de béton ou de métal encastrés dans le sol, les « Stolpersteine »…
… de l’artiste Gunter Demnig, qui rappellent la mémoire d’une personne déportée. Ces cubes se trouvent devant leur dernier domicile.
La famille Raesener vivait là
Voilà la visite se termine …
Je quitte le groupe pour me rendre à « l’église du souvenir » Kaiser-Wilhelm- Gedächtniskirche. Les bombes la détruisirent en 1943 et ne laissèrent que le clocher décapité. La ruine a été partiellement conservée, intégrée à un nouveau bâtiment et transformée en mémorial consacré à la paix et à la réconciliation.
Les jambes deviennent lourdes et les pieds commencent à me faire souffrir… mais je ne peux quitter Berlin sans avoir fait les magasins et, plus particulièrement le KaDeWe…, c’est gigantesque! Je crois que je n’ai jamais rien vu de si grand! Je me balade d’un étage à l’autre mais finalement décide de rejoindre l’hôtel pour me reposer un peu avant mon départ vers 23h00.